ôde

Comment peux-tu avoir une telle présence,
ô toi qui ne sens parfois pas tes contours ?
J’embrasserai chaque parcelle de ta peau pour que tu saches que tu es là
ton visage mutin et profond de créature des bois
ton crâne et tes cheveux, et les longs et les ras
m’arrêtant en chemin sur tes paupières qui abritent
deux yeux dont je ne dirais rien car ils sont au-delà des mots.
En passant sur ta nuque je te respirerai
et ton odeur fauve m’inspirera quelque dévoration
que je contiendrai pour parcourir ton dos, paysage cosmique
où poussent parfois des graines dont tu me confies la délicieuse éclosion.

Si je croyais en Dieu

Si je croyais en Dieu
tu m’entendrais chaque jour faire la même prière :
que la connexion ne soit pas une chimère.
Je n’espère rien de mieux
rien de moins que ce vœu,
que ce fervent désir de ressentir encore
cette puissante émotion que plus que tout j’adore,
dans mon cœur dans mon âme et aussi dans mon corps.
Et si tu vois parfois des larmes dans mes yeux
c’est que mon esprit flanche, croit que c’était fiction,
qu’il était ridicule l’espoir de connexion
– et que ce qui n’était qu’une respiration
revêt pour moi le masque d’un terrible adieu.

2022, juillet : enterre-moi

j’ai besoin de me donner le droit
de ne plus exister
doucement disparaître
n’être plus là pour personne
pour, peut-être, l’être à nouveau pour moi
quand j’écris le droit de ne plus exister
je veux dire
le droit d’exister sans prouver
qu’il y a une raison
un sens, une direction
ou le moindre mérite
(exister comme un chat
sans culpabiliser)

je suis si fatiguée de me raconter
comme un dégoût de la répétition
ma lassitude sans espoir d’être guérie par l’ailleurs
je voudrais être happée par le gouffre
de l’oubli
le soulagement de la terre fraîche et du silence
caressant les escholtzias
– pour réussir à prendre des vacances,
je n’imagine rien de moins radical

bored

bored by my own thoughts
how can I think about something new?
I wish I could surprise myself
– and I sometimes do
but most of the time I’m too
familiar
stable
or worst
I lack the unknown
the thrill of discovery
but even when I explore
I look mostly inward
how to
get out?
become other
loose myself again?

truth is: I’m not as interested in the world as I used to be
is this just getting old? more traumatized? or both? Did I just lack the space that could allow me to be interested?
I don’t want to know that much – I want to live, I want to feel, and I guess this makes me more focused towards myself than a quest for knowledge would

produit de luxe défectueux

produit de luxe défectueux
c’est mon identité de genre
c’est un ressenti interne
c’est le combo entre le complexe de supériorité et l’estime de soi pétée (culpabilité, haine de moi, honte, yada yada yada)
c’est pas mon orientation sexuelle mais on en est peut-être pas si loin
c’est au moins une identité sexuelle, ça, c’est sûr
c’est ma volonté d’être adorée, désirée, et la certitude de le mériter
mélangée à l’idée que peut-être personne ne va le remarquer
c’est mon désespoir profond de croire qu’on ne me veut que pour m’utiliser
et qu’en plus je ne suis même pas un produit fonctionnel
j’ai de la valeur
ou au moins – j’en ai eu
pourtant tu vas être déçu·e :
trompé·e sur la marchandise

27 mai 2021

Avec quatre années de recul,
je peux vous l’affirmer, les bulles,
c’est efficace pour flirter.
Bonheur = simplicité,
c’est plus compliqué comme calcul ;
heureusement on est entêté·e·s,
de véritables têtes de mules,
et le temps qu’on prend pour chercher
est loin d’être un jeu à somme nulle.
Ah, ces quatre années à s’aimer,
sûr qu’on a joué aux funambules !
Sur les fils où on déambule
nous ne nous laissons pas tomber,
sans cesse nous apprenons des bulles
l’art délicat de voltiger.

2020, septembre

J’aimerais qu’on sache faire exister les conflits sans créer pour autant des trous dans la toile. Je me sens lourde. Lourde de tristesse pour les trous, lourde des chemins perdus, lourde de l’amertume de savoir qu’ils ne sont pas perdus pour tout le monde, lourde de la responsabilité de tisser, et de la sensation que nous sommes trop peu à qui ça importe vraiment. Ça prend du temps de créer les espaces où je me sens vivante, le plus pleinement, et je suis fatiguée du rythme avec lequel il me faut les renouveler, et des patterns tordus qui constituent la toile (chemin de traverse : apprendre à être aussi vivante que possible partout). Je veux du souple, mais du plus solide. Je crois toujours que c’est possible. Le sentiment que ça ne peut exister sans une forme de renoncement à la pleine et pure affinité. Deuil difficile, je contemple les réseaux lumineux qui émergent dans l’obscurité de la terre, les larmes aux yeux. Je ne peux pas attendre des autres ce que je ne fais pas moi-même ; modéliser, c’est mon éthique. Accepter de m’engager dans des environnements imparfaits, trouver d’autres horizons relationnels que la joie et la jouissance d’être avec. Vivre ensemble, c’est beau quand oublie quelques instants que ça a été salement galvaudé. Vivre avec, parce que c’est « plus qu’une consolation […] une raison de vivre ».

Cet été j’ai confié ma vie à la mer. Maintenant, j’aspire à jouer le jeu de la vie jusqu’au bout. C’est terrifiant et sublime et incertain. C’est un saut de la foi, c’est m’en remettre, enfin, à plus grand que moi. Mais avant de peut-être exister d’une manière qui me dépasse, il faudra que quelques années passent.

Je pense avec émotion à l’adolescente que j’étais et qui ne voulait pas le jouer, ce jeu. Elle est morte et je porte son héritage, en forme de sensibilité persistante à la rage et au désespoir de la contrainte, au droit de ne pas vouloir, de dire non, de mourir. Et si, dans la pratique, j’ai parfois manqué d’humilité ces dernières années, je veux à nouveau accueillir le refus de la vie comme modalité de l’existence, et apprendre à en prendre soin sans plus chercher à convaincre de me rejoindre de ce côté-ci. Rendre hommage à la princesse, et à tou·te·.s celleux qui penchent, sans vraiment l’avoir choisi non plus, vers la destruction comme solution.

Garde rapprochée

Garde rapprochée de violeurs
J’ai 
enfin trouvé mes vraies valeurs
Au 
lieu de vivre dans un monde faux
Main
tenant j’incarne mes idéaux

Tu sais moi j’ai choisi mon camp
j’ai arrêté de faire semblant
Puisque je vendais déjà mon cul
Qu’est-ce qui m’empêchait d’vendre mon âme en plus ?
D’autant que c’est super bien payé
et je passerai peut-être à la télé

je sais pas ce qui m’a pris d’être féministe
ou d’essayer de mener une vie d’artiste
j’ai finalement quitté tous ces milieux tristes
et leurs thé-o-ries compliquées
moi dorénavant, j’ai un vrai métier :
je suis, je suis, garde rapprochée

Garde rapprochée de violeurs
J’ai 
enfin trouvé mes vraies valeurs
Au 
lieu de vivre dans un monde faux
Main
tenant j’incarne mes idéaux

C’est au-delà de “je cautionne” : 
je fais une recommandation
et je paierai de ma personne 
leurs libérations sous caution
c’est vraiment un métier de femme
ça en demande du dévouement
j’ai du apprendre à être ferme
quand au quotidien je leur mens
j’ai des egos à protéger 
de l’insupportable vérité
faire en sorte qu’ils soient aveuglés
c’est 
ma lourde responsabilité
je suis, je suis, garde rapprochée

Garde rapprochée de violeurs
J’ai 
enfin trouvé mes vraies valeurs
Au 
lieu de vivre dans un monde faux
Main
tenant j’incarne mes idéaux

J’ai proposé mes services à un ami qui
m’a dit que le violeur c’était pas vraiment lui
– il était dans le camp des violeurs gentils.
Du coup je me suis spécialisée
je bosse que pour ceux qui sont certifiés
100% dangereux pour la société

Je suis, je suis, garde rapprochée !

La préférée

Je ne vous l’avoue qu’avec peine
– Si j’avais honte en l’écrivant,
Ne parlons pas de le slammer !
C’est aussi un peu enivrant
D’imaginer que vous l’sachiez –
Je veux être votre préférée.

De quand date cette rengaine ?
Est-ce du premier petit frère,
Ou du temps de l’école primaire ?
Malsaine compétitivité,
Aussi loin que vont mes repères
J’ai voulu être la préférée.

Je sais bien la place de mon père,
À moi comme à lui-même absent,
Dans mon drame par trop ordinaire.
Si j’métais sentie regardée
Aurais-je ce désir si brûlant
D’être dans vos cœurs, la préférée ?

Si j’avais eu son attention
Essayerais-je d’avoir la vôtre ?
D’y trouver une confirmation,
Une forme de supériorité
Mon estime dans les yeux des autres,
L’espoir fou d’être préférée ?

Parfois n’pas être la plus aimée
Ressemble à n’être rien du tout.
Je me souviens quand j’ai appris
Comment on pouvait être traitée
Quand nous arrive le malheur
De ne pas être la préférée.

On nous dit que tous les enfants
Doivent être aimés d’la même manière,
Pourtant Mémé préférait Pierre
Aucun risque d’égalité.
Moi j’avais pas perdu la guerre :
Des autres, j’serais la préférée !

Et bien souvent, si je m’attache,
Alors, ça ne va pas tarder.
J’suis pas toujours assez bravache
Pour candidement le demander ;
C’est important que tu le saches :
Je voudrais être ta préférée.

Je veux être votre préférée
Sans pour ça devoir jouer un rôle
Ou me forcer à être drôle.
Juste ma personnalité,
La force de l’authenticité,
Et que voilà, le tour soit joué !

Je rêve de trouver un mécène,
Que mes textes soient acclamés
D’être un mystère qu’on veut percer
L’objet de vos curiosités
Je veux le contraire de la haine
Je veux être votre préférée

Et pourquoi pas, même, votre Reine,
Par votre ferveur transportée,
Sans oublier une bonne élève
Rougissant d’être récompensée,
Qui n’ayant plus rien à prouver
Jouirait d’être la préférée.

La tienne, la tienne, et puis la tienne !
Pas que je sois mégalomane
Mais vous savez être préférée
C’est presque comme une cabane
Sauf que sans devoir me cacher
Je m’y sens en sécurité.

Quand je me présente sur scène
Vous saurez maintenant décoder :
Dès que je m’apprête à trembler
C’est que j’veux être la préférée.
Et pas besoin de me mentir
– Mais laissez-moi l’imaginer.

2011-2019 est / à intégré·r

Lécher un lobe d’oreille, inconsciente de ce qui agit.
Trouver normal de danser sans fatigue toute la nuit.

Je vois rien si j’ouvre les yeux !
J’ai l’impression d’être une partie d’un tout, d’un cocon chaud et protecteur.
Je ne sais plus à quel moment cela s’arrête, à quel moment l’harmonie est rompue.
On m’a expulsé dans le vaste monde et je sens à nouveau le poids de la solitude, de mon individualité, la distance avec les autres.
Je me demande si le monde a toujours été comme ça mais que je n’étais pas capable de m’en rendre compte.

Mais vous entendez toutes mes pensées !
Qu’est-ce que ce serait si je n’avais pas à me protéger…
Même trippée, j’ai peur qu’ils s’ennuient…
Tu m’avais promis des licornes !
Non, Alienne.
J’ai tout aimé de vous And death shall have no dominion

On a toute la nuit pour danser – on a toute la vie pour danser – on dansera ensemble toute la vie.
le monde en paix qui cesse enfin d’être menaçant
c’est l’enfer joyeux

Vouloir que ce soit bien non pour le moment présent mais pour le futur, c’est un problème.

La Sainte.
Ce que tu recherches c’est le contrôle des désirs.

Je me met à avoir très peur de l’intrusion, je ressens un besoin très fort d’avoir “mon territoire”. Intolérable aussi l’idée qu’ils puissent m’entendre moi, et d’une certaine manière “me voir”, me juger.
je lui demande de protéger mon sexe en mettant sa main dessus, de façon couvrante.
c’est trop compliqué
les règles sociales, elles peuvent entrer en contradiction avec mes besoins
Difficulté si grande à rester centrée sur moi, mon besoin. Et en même temps quand je retrouve ce besoin, il me semble extrêmement urgent et devoir passer avant TOUT le reste
si je me perds, comment me retrouver ?
si je ne me contrôle plus, qui me contrôlera ?
je suis vivante
“guéris, guéris”

se prendre un mur mental de plein fouet
panique de petit animal enfermé
on m’a privé d’une partie de ma vitalité

je ne sais pas profiter
je suis défectueuse
repérer les pensées qui ne servent pas mon bonheur, ou quoi que ce soit de fonctionnel,
prendre un virage volontaire
créer mes chemins

Ce n’est que ça ?
Si tout est continuité, je ne sais pas comment choisir de me placer dessus (extérieur-intérieur, moi-les autres, état de conscience normal-état de conscience modifié…). Tout me semble trop compliqué.
cette inquiétude ne faisait RIEN pour ma survie. Elle ne garantissait rien. Elle n’était pas active à autre chose que de s’auto-alimenter.
Est-ce que j’ai le droit d’exister ?
Il y a plein de choses dont je ne peux pas me protéger.
Je dois accepter mon impuissance pour pouvoir construire de la puissance à l’intérieur des limites de l’univers.
Tout ça est très désagréable. Mais je ne me laisse plus faire.
C’est compliqué de changer. C’est compliqué d’avoir dépensé autant d’énergie pour rien.

Devenir Forêt. Augmentation plutôt que sortie de moi.

Ce qui circule en moi des pieds à la tête est un serpent, et l’énergie est noire.
Je me sens vide, sans élan, sans pulsion, et je le regarde qui a l’air de savoir profiter de l’expérience. Je ne mérite pas de vivre puisque je n’ai pas d’envie.
Je suis un bébé qui déteste les bébés.
ll m’a vu vieille et m’a aimée.

C’est mon univers, nous sommes un univers.
Aide-moi. Aide-moi à rester dans le mouvement.
La sensation d’être arrivée, dans ton amour, de vivre enfin ce que je recherchais tout ce temps.
Le moment de la fin est si déchirant. Je tente de retrouver la connexion, j’échoue, et là je m’écroule. C’est comme si j’avais à nouveau perdu le paradis, l’unité, l’extase. Je ne veux pas perdre. Pas perdre contre mon scénario, pas qu’il se répète encore, je pense que ce n’est pas possible, pas acceptable, que ce soit encore la même histoire (je n’ai pas conscience qu’il se répète parce que je le porte avec moi, que c’est mon regard, mes pensées, mes émotions, qui causent la répétition).
Je sais pas quoi vous dire, à part est-ce que vous avez des mouchoirs pour que je pleure la solitude d’être seule dans ce monde ?
Je dois, encore, devenir adulte de force, dans la souffrance.
L’art comme simulacre de mon besoin de consolation impossible à rassasier.
L’art comme fondamentalement voyeur, comme une tentative d’absorber des expériences de vie. Manger nos propres expériences perdues.
J’ai envie que ma vie continue, de trouver du plaisir avec d’autres, de me sentir indépendante.
I am the Worst Baby, le bébé de la question existentielle

Je suis ma chance ouverte et mon encerclement.
fuck it, ici, je fais ce que je veux
Personne ne m’aimera comme je m’aime. Personne n’aura ce rapport à ce corps.
j’ai des yeux incroyables
j’aurais pu me perdre dedans
gender is meaningless
je vois tout, le masculin, le féminin, tout dépend de là où je porte mon attention, de comment j’exerce mon regard
pas de réponse plus vraie qu’une autre
multiplicité non figée.
La résolution d’en prendre soin, à partir de maintenant, même quand la frustration sera forte.

Il me propose une histoire :
ce n’est pas que je ne sais pas profiter, c’est que je ne sais pas où aller. C’est que je suis submergée par toutes ces stimulations.
Ielles cherchent tou·te·s un moment de connexion. Nous, nous le vivons.

Ces affiches sont familières, c’est un peu comme si elles étaient moi.
Ma conscience se scinde en trois, comme un cristal qui se brise, sans qu’aucune des trois parties équivalent à un “moi”.
Je n’ai pas peur de me perdre, je laisse les choses se faire. J’essaie de ne pas repousser les émotions qui viennent à moi.
Si j’ai été colonisée par les araignées violettes, c’est ok.
Là je me vis plutôt comme un territoire.

Mouvement du bassin comme pour repousser ce qui angoisse.
Expérimentation avec une petite araignée : quand je vais vers elle, je vois que c’est elle qui a peur, qui cherche à m’échapper.
Ce n’est pas que j’aurais peut-être envie d’un enfant, c’est que j’ai désormais envie d’un enfant, et que je ne sais pas si ça arrivera un jour.

Il y a une petite partie de mon cerveau qui n’est pas à moi. Je suis, du moins, me sens, percée. C’est la lutte intérieure : certain·es trouvent ça essentiel, d’autres savent que cette croyance me fait du mal. Il est trop tôt pour y renoncer.

il est complètement absurde que nous menions le type de vies qu’on mène, nous, l’humanité, quand on peut ressentir ça.
Je me sens limitée dans ma capacité d’expression, j’ai envie de bouger, mon bassin surtout, mais je n’ose pas, je ressens un empêchement, une gêne, une inquiétude, un sentiment de forte responsabilité par rapport à la situation et de frustration – l’idée que si je ne suis pas en vigilance, alors personne d’autre ne le sera.
La constatation de reproduire des dynamiques systémiques oppressives à l’échelle individuelle, et de me sentir enfermée dedans au présent. Pour vivre / agir, il faut forcément que je prenne le risque d’être abusive ; je trouve ça affreux, insupportable.
Il n’y a aucune menace immédiate.
L’identité comme étant de l’attachement et de la loyauté envers nos souffrances.
Vivre ou mourir. Vivre ou mourir.
Mon féminisme me fait du mal.
Je veux avoir le droit de vivre une vie qui autorise la prise de risque.
C’est normal que les gens ne soient pas capables de reconnaître leurs échecs, torts, abus, vu comme ils sont traités quand ils le font.
J’ai besoin de savoir que si je fais un usage de mon pouvoir qui lui fait du mal, elle saura me le dire et ne pas le traiter comme quelque chose d’impardonnable.